mercredi 24 avril 2013

Les États-Unis planifiaient le renversement des Saoud


Les États-Unis planifiaient le renversement des Saoud


Voici l’incroyable scénario que l’on aurait pu voir. Il est comparable à la lutte qui oppose les rebelles au gouvernement syrien. Finalement c’est l’Arabie Saoudite qui finança la guerre en Irak. 

Le 18 novembre 2003, le département d’État états-unien organisait une Commission consultative pour la liberté religieuse à l’étranger. Les intervenants se sont efforcés de décrire le wahhabisme comme « une menace stratégique contre la sécurité des États-Unis ». Cette initiative n’est pas isolée mais s’inscrit dans une campagne visant à justifier une ingérence états-unienne en Arabie saoudite alors qu’approche la fin de l’accord entre les deux pays qui garantit à Washington le monopole des concessions pétrolières. 

Le moment est venu pour Washington de renégocier l’Accord signé pour cinquante ans entre Ibn Séoud et Franklin D. Roosevelt à bord du Quincy, le 13 février 1945. 


L’Arabie saoudite devrait remettre en cause le monopole des concessions pétrolières accordé aux USA et le montant des royalties qu’elle perçoit. Dans cette perspective, il est devenu obsessionnel pour les grandes compagnies pétrolières de contrôler le processus de succession monarchique. En cas de décès du roi Fadh, gravement malade depuis des années, le prince régent Abdallah devrait accéder au pouvoir. Or celui-ci est réputé souhaiter rechercher des rapports d’égalité et non plus de vassalité avec Washington. 

S’il était empêché, son demi-frère, le prince Sultan, réputé plus pragmatique, pourrait succéder au roi Fadh. Dès le 13 septembre 2003, l’administration Bush a affirmé que les attentats qui venaient d’être commis à New York et Washington l’avaient été par dix-neuf pirates de l’air, dont quinze auraient été de nationalité saoudienne. Cependant, le FBI n’a jamais indiqué comment il avait établi la liste de ces suspects, lesquels ne figuraient pas sur les listes fournies par les compagnies aériennes de passagers embarqués. En outre, le gouvernement saoudien a retrouvé vivants cinq des suspects prétendus morts dans ces supposés attentats suicides (Abdulaziz Alomari, Mohand Alshehri, Salem Alhazmi ett Saeed Alghamdi vivent en Arabie saoudite, tandis que Waleed M. Alsheri est pilote à Royal Air Maroc). 

Quoi qu’il en soit et contre toute évidence, le FBI maintient ses accusations fantaisistes, lesquelles sont reprises sans discussion par les politiciens états-uniens et la presse occidentale. Par la suite, des opérations de désinformation ont été conduites pour faire croire que certaines personnalités et sociétés saoudiennes avaient financé ces attentats. Ainsi en France, un enquêteur du groupe Vivendi, Jean-Charles Brisard, ancien conseiller parlementaire au Congrès des États-Unis, a réalisé une étude sur L’Environnement économique d’Oussama Ben Laden. Il y mettait en cause le milliardaire Khalid Ben Mafouz et la Société de banque arabe (SBA). 

Selon nos confrères du Pli, ce document fut remis en main propre par le directeur général de Vivendi, le très américanophile Jean-Marie Messier, au président Jacques Chirac pour l’alerter sur les agissements en France de la SBA. Ce rapport fut publié par Guillaume Dasquié sur le site internet de la revue Intelligence Online, dont il était le rédacteur en chef. Il fut également transmis par Vivendi à la Mission d’information parlementaire sur le blanchiment des capitaux et annexé à un rapport public de l’Assemblée nationale. 

Or les imputations formulées dans ce document relatives à Khalid Ben Mahfouz et à la SBA étaient fausses. Découvrant qu’ il avait été manipulé, le rapporteur parlementaire, Arnaud Montebourg, publia immédiatement un rectificatif et fit retirer de la distribution le texte litigieux. Les mêmes Jean-Charles Brisard et Guillaume Dasquié écrirent bientôt une version remaniée de ce document. Elle fut publiée par les Éditions Denoël sous le titre Ben Laden, la vérité interdite. Si les imputation relatives à la SBA avaient été retirées, cette nouvelle version comprenait des mises en cause de la famille d’Oussama Ben Laden. 

Jugé diffamatoire par les tribunaux helvétiques, le livre fut interdit en Suisse où vivent plusieurs membres de la famille Ben Laden. Un cabinet d’avocat sollicita alors des familles de victimes des attentats du 11 septembre pour intenter en leur nom une action judiciaire en complicité contre la famille royale saoudienne. Ce cabinet intégra dans son équipe l’enquêteur et juriste français Jean-Charles Brisard. 

Cependant, à l’issue d’une longue procédure, la Justice états-unienne rejeta la plainte. Les demandeurs n’avaient pas été en mesure d’étayer leurs allégations selon lesquelles les dirigeants saoudiens avaient procédé à des versements à titre personnel à des organisations charitables qui auraient financé les attentats. 

Le 10 juillet 2002, Richard Perle présidait au Pentagone la réunion trimestrielle du Comité consultatif de la politique de défense pour entendre un exposé de Laurent Murawiec 1 , ancien conseiller de Lyndon LaRouche et de Jean-Pierre Chevènement, puis chercheur à la Rand Corporation. Il se livra à une attaque en règle contre l’Arabie saoudite et conclut en préconisant le renversement des Saoud, la confiscation des puits de pétrole, et le transfert de la gestion des lieux saints à la monarchie jordanienne. En mai 2003, dans Le Figaro, le même Laurent Murawiec accusait nommément le prince Turki d’être le chef d’Al Qaïda et le commanditaire des attentats du 11 septembre. 

Désormais, les attaques contre l’Arabie saoudite se focalisent sur le rôle du wahhabisme dans le royaume. Ce courant religieux fondamentaliste se caractérise par un refus intransigeant des idoles qui l’a conduit par exemple à détruire la maison de Mahomet parce qu’elle devenait un lieu de pèlerinage. Il s’agit donc, dans un univers musulman, d’un mouvement équivalent à celui des Iconoclastes chrétiens qui se développa d’ailleurs dans la même région. 

Le secrétaire adjoint à la Défense, Paul Wolfowitz, a multiplié les accusations contre le wahhabisme « école de la haine », qui serait responsable de la formation des pirates de l’air saoudiens qui auraient commis les attentats du 11septembre. 

Puis, le secrétaire Donald Rumsfeld a dénoncé les « madrasas » financées par les wahhabites saoudiens, qui transmettraient cette haine dans le monde. Ces accusations ont été relayées par le think-tank dont se réclament MM. Wolfowitz et Rumsfeld, le Center for Security Policy. 

L’un des chercheurs travaillant au sein de cette association, Alex Alexiev, est venu témoigner devant le Sénat, le 26 juin, de ce que le wahhabisme était un extrémisme soutenu par un État et propagé dans le monde entier. Le 18 novembre, le département d’État a organisé une table ronde sur le thème : « L’Arabie saoudite, une menace stratégique : la propagation globale de l’intolérance ». 

Parmi les experts sollicités, on remarquait l’ancien officier de la CIA Robert Baer auteur de Or noir et Maison-Blanche : Comment l’Amérique a vendu son âme pour le pétrole saoudien, et Martin S. Indyk, ancien ambassadeur en Israël. 

Les intervenants ont souligné, non sans raison, l’obscurantisme du clergé wahhabite, pour introduire un amalgame sans lien logique avec le terrorisme anti-états-unien. 

À Riyad où les attentats se multiplient depuis plusieurs mois, les autorités sont désormais persuadées d’être face à une vaste mise en scène visant à les renverser. 

Elles accusent à demi-mots Washington d’attiser les extrémismes pour déstabiliser le régime et justifier son ingérence pour sauver ses concessions pétolières. 

Source 

UN PÔLE DE STABILITÉ DANS UN ENVIRONNEMENT RÉGIONAL DÉGRADÉ 

A. LE MAINTIEN D’UNE RELATION SPÉCIALE AVEC LES ETATS-UNIS 

La relation saoudo-américaine est ancienne et profonde. Elle repose sur une alliance de raison entre le besoin de sécurité du Royaume face à ses voisins et le souci américain de la stabilité du premier producteur mondial de pétrole. Scellée le 14 février 1945 entre le roi Abdelaziz et le président Roosevelt à bord du USS Quincy, sur le canal de Suez, cette relation s’est renforcée durant la période de guerre froide. 

Dans une région alors souvent tentée par l’alliance avec l’Union soviétique, l’Arabie saoudite a représenté un rempart à l’expansion de l’influence soviétique dans la région et même au delà, par la combinaison d’une idéologie puissante et de moyens financiers importants. 

Avec la fin de la guerre froide, les inconvénients de cette alliance sont apparus plus nettement. En novembre 1995 et juin 1996, deux attentats ont visé les forces américaines, témoignant du ressentiment de certaines franges de la population à l’égard de cette présence militaire étrangère. 

Depuis la fin des années 1990, les Etats Unis ont pour leur part procédé à un vaste redéploiement de leurs troupes vers les Etats du pourtour de la péninsule arabique, en renforçant leur présence au Qatar, aux Émirats arabes unis, ainsi qu’à Bahreïn. 

En janvier 2002, le retrait des 5000 militaires américains stationnés en Arabie depuis la première guerre du Golfe a été annoncé. Un tel retrait avait déjà eu lieu au début des années 1960, lorsque les Américains avaient quitté la base de Dahran, dans l’est du pays. 

S’il peut témoigner d’un « rafraîchissement » des relations, ce redéploiement permet aussi de ménager la position du régime saoudien face à une opinion publique largement anti-américaine. De façon symétrique, l’opinion américaine est devenue foncièrement hostile à l’Arabie saoudite depuis le 11 septembre 2001. La crise a atteint son paroxysme avec la plainte déposée par les familles de victimes contre les autorités saoudiennes. 

Cette dégradation des relations a encouragé les Saoudiens à diversifier leurs partenaires extérieurs. De même entendent-ils réorienter la destination de leurs étudiants envoyés à l’étranger, jusqu’alors essentiellement présents dans les universités américaines. 

Lors des entretiens de la délégation, la position américaine sur le conflit israélo-palestinien a souvent été tenue pour première cause de la dégradation de la relation saoudo-américaine mais celle-ci ne se dément pas, chacun des deux partenaires étant irremplaçable pour l’autre. 

L’importance des intérêts financiers mutuels, l’aspect stratégique de la coopération énergétique et le réalisme diplomatique du Royaume conduisent finalement à de réelles convergences. 25 000 américains vivent en Arabie et les Etats Unis restent le premier investisseur étranger. La lutte contre le terrorisme a aussi constitué un véritable test pour la relation bilatérale. 

B. UN ENGAGEMENT RÉSOLU DANS LA LUTTE CONTRE LE TERRORISME 

Au cours de l’année 2003, les autorités saoudiennes ont multiplié les opérations contre les cellules islamistes radicales. Ces opérations ont conduit à de nombreuses arrestations dont celle de 16 des 26 terroristes les plus recherchés du Royaume et à une centaine de morts dans les rangs islamistes. 

Le contrôle financier et policier des organisations caritatives a été renforcé. En février 2005, le Royaume a organisé une conférence internationale sur la lutte contre le terrorisme, affichant son engagement à l’échelle internationale. 

C. UNE PUISSANCE RÉGIONALE ATTACHÉE AU RÈGLEMENT DES CONFLITS 

1. Des relations normalisées avec les Etats de la région L’Arabie a longtemps eu des différends frontaliers avec la quasi-totalité de ses voisins. Ces relations sont désormais apaisées, les frontières avec le Qatar, le Koweït et le Yémen ayant fait l’objet d’accords bilatéraux. 

Les relations du Royaume avec l’Iran sont fortes ; les deux Etats sont liés depuis 2001 par un traité de sécurité et un accord commercial. Le développement des relations a d’ailleurs largement contribué à l’apaisement et à l’amélioration du sort de la communauté chiite. 

Aujourd’hui c’est davantage la situation chaotique de l’Iraq, avec lequel l’Arabie partage plus de 800 kilomètres de frontière, qui constitue un véritable souci de sécurité. 

2. Les difficultés de l’intégration régionale 

Créé en 1981, le Conseil de coopération des Etats arabes du Golfe8(*) (CCEAG) constitue une union douanière depuis le 1er janvier 2003 mais prépare l’union monétaire dans un contexte difficile. Les craintes partagées à l’égard de l’Iran et de l’Iraq, qui fondaient la cohésion originelle du Conseil, ont disparu sans laisser place à d’autres facteurs fédérateurs. 

Sur le plan politique, l’intégration régionale a souffert du déséquilibre entre le poids prépondérant d’un grand pays -l’Arabie-, par rapport à ses voisins et de différends frontaliers entre les Etats de la péninsule. Ces différends sont désormais réglés mais d’importantes différences d’appréciation subsistent, notamment avec le Qatar qui a fait le choix d’une normalisation progressive de ses relations avec l’Etat d’Israël. 

De tous les Etats du CCEAG, l’Arabie saoudite est le seul à ne pas être membre de l’OMC. Les échanges intra-régionaux restent faibles en raison de la complémentarité réduite des économies du Golfe. 

Les Etats du Golfe développent leurs relations commerciales bilatérales avec les Etats-Unis, à l’instar de Bahreïn, déjà signataire d’un accord de libre échange, du Koweït et des Emirats arabes unis qui ont engagé des négociations. 

Un accord de libre-échange est en cours de négociations 1991 entre le CCEAG et l’Union européenne, que la signature d’accords bilatéraux avec les Etats Unis pourrait remettre en cause. Les membres du Maglis Al shura craignent que ces accords bilatéraux ne conduisent à la disparition du CCEAG et au délitement de la solidarité économique des Etats de la péninsule. 

Le projet de réforme de la Ligue arabe proposé en 2004 à Tunis par l’Arabie pour reprendre l’initiative face aux propositions américaines de Grand Moyen-Orient, n’a pas connu de suite. 

3. Une position convergente avec la France sur les conflits de la région Interrogés sur les questions régionales, les interlocuteurs de la délégation ont avant tout manifesté le souci prioritaire de la stabilité. Partisans d’une ligne réaliste, ils ont fait part de leur attachement à un règlement du conflit israélo-palestinien, ferment d’instabilité. 

Comme pour d’autres Etats de la région, le conflit israélo-palestinien représente aussi une question de politique intérieure pour l’Arabie saoudite. 

La seconde Intifada et la dégradation très rapide de la situation dans les territoires palestiniens qui ont suivi l’échec des négociations de Camp David à l’été 2000 ont conduit le prince héritier Abdallah à formuler des propositions, reprises par le sommet de la Ligue arabe lors du sommet de Beyrouth en mars 2002, et renouvelées lors du sommet d’Alger de mars 2005. Le plan repose sur un retrait d’Israël des territoires occupés en contrepartie d’une normalisation de ses relations avec les Etats arabes. 

La question israélo-palestinienne, instrumentalisée par les mouvements islamistes, alimente les difficultés du régime face à son opinion publique dans sa relation avec les Etats-Unis. 

Sur l’Iraq, les autorités saoudiennes font preuve de réserve et de pragmatisme. Restée à l’écart des opérations militaires, menées depuis le Qatar, l’Arabie saoudite affirme aujourd’hui son attachement à la stabilité du pays et au respect des droits de la minorité sunnite. 

Les interlocuteurs de la délégation ont soutenu la mise en oeuvre de la résolution 1546 et la constitution du gouvernement iraquien, tout en faisant part de leur inquiétude et de leur pessimisme quant à l’évolution de la situation sécuritaire. 

Sur le dossier libanais, les autorités saoudiennes ont exprimé le même souci de stabilité, s’interrogeant sur la capacité des autorités libanaises à la maintenir après le retrait syrien, considérant qu’aucune stabilité politique n’est possible sans sécurité. 

Le Prince Abdallah a joué un rôle de médiation avec le président syrien Al Assad en faveur du retrait des troupes syriennes du Liban, tout en ménageant les positions syriennes. 

Les interlocuteurs de la délégation au Maglis Al Shura ont critiqué le confessionnalisme qui régit la vie politique libanaise, considéré comme contraire au concept moderne de l’évolution politique et estimant qu’il convenait de « transférer le sentiment national de la religion à la patrie ». 

D. UN RÔLE MODÉRATEUR SUR LE MARCHÉ DES HYDROCARBURES 

1. Un producteur irremplaçable 

L’Arabie détient 25 % des réserves mondiales de pétrole avec 260 milliards de barils et assure 12 % de la production mondiale avec des coûts de production remarquablement faibles, de l’ordre de 2 dollars le baril. Premier exportateur mondial, elle produit environ 8 millions de barils par jour, avec une capacité supplémentaire de 2 millions de barils. Elle occupe par ailleurs le quatrième rang mondial pour les réserves de gaz. 

2. Un rôle modérateur 

Au sein de l’OPEP, le Royaume a toujours privilégié une stratégie à long terme de maintien de prix modérés pour préserver une croissance mondiale consommatrice d’hydrocarbures et décourager le développement d’énergies alternatives, tout en poursuivant l’objectif d’un niveau de revenus satisfaisant. 

Le Royaume s’est substitué à plusieurs reprises à des producteurs défaillants (Irak ou Vénézuela) tout en contribuant largement au redressement des cours du pétrole en plaidant pour le respect des quotas au sein de l’OPEP 

Les cours actuels peuvent aussi rentabiliser des investissements très lourds permettant d’augmenter la capacité de production. L’Arabie saoudite a récemment porté sa capacité à 11 millions de barils/jour et souhaite maintenir une capacité de production inutilisée de 1 à 2 millions de barils/jour, pour assurer un rôle de régulateur. L’Arabie a l’intention de porter cette capacité à 12,5 millions d’ici à 2009. Elle est d’ailleurs le seul producteur à disposer de cette marge de manoeuvre, déterminante pour la stabilité des cours et la sécurité des approvisionnements, alors que l’Irak peine à reprendre son rang parmi les pays producteurs. 


* 8 Le CCEAG comprend six pays : l’Arabie saoudite, le Koweït, les Emirats arabes unis, Bahreïn, Oman et le Qatar.

Notes



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