dimanche 13 janvier 2013

Et si nous n'étions pas des colonies?


Et si nous n'étions pas des colonies?

"Nous, nous sommes une colonie de la France, donc la France doit nous aider","La France doit remplir son devoir et tuer les terroristes pour nous puisque c'est elle qui nous a colonisés", "C'est très bien que la France intervienne", "La France doit intervenir pour nettoyer le terrain", "L'intégrité du Mali est plus importante que toute idéologie, donc la France doit faire la guerre pour nous débarrasser du cancer, islamiste ", "Quoi!? La France laisse les terroristes coupés les mains au Mali?", "La France doit nous débarrasser de ces voyous"..., voilà quelques-unes des phrases qui résonnent dans certains milieux. Il faut dire que ça vole bien bas: l'homme noir qui réinvente le "rôle positif de la colonisation?". Après la Côte d'Ivoire, la Libye, la Centrafrique où la France a guerroyé et guerroie, voici sonné l'heure où le colonisateur prétendu chassé d'Afrique depuis les années 60, est prié de revenir. Les troupes militaires qu’il base dans « les indépendances dépendantes» dans l’indifférence quasi-absolue des africains sont priés de descendre dans l’arène pour nous. Qu'aurions-nous donc fait si nous n'étions pas un peuple-enfant dont le bon développement et la sécurité eussent été confiés aux colons, bons « Pères Blancs »? L'homme noir a trouvé une échappatoire: à chaque difficulté, il demande aux colons de le secourir, au nom même de leurs devoirs de tutelle. En agissant ainsi, l'homme noir a perdu un des attributs les plus essentiels de la vie: la capacité de se défendre dont est doté tout être aussi bien végétal qu'animal. Dans les 1990, un groupe de Zouglou du territoire de Côte d'Ivoire chantait "venez nous sauvez ooohhh, galère va nous tuer oooh". Ces paroles traduisent dans une terrible exactitude l'un des traits philosophiques africains à savoir que "nous ne pouvons pas grand chose nous-mêmes contre nos démons". Mais cette logique démissionnaire ne se limite pas uniquement à l'absence de moyens. Elle est aussi la traduction de l'image que l'Africain se fait de lui-même, c'est-à-dire, un Etre dont la vie est plus que sacrée. Laquelle vie ne mérite en aucune circonstance être sacrifiée pour une cause qui serait hautement plus noble. Cette image se double de ce que l'homme noir se pense et se déclare Pharaon, un pharaon qui ne peut pas ou ne doit pas mouiller sa chemise ni pour sa terre, ni pour l'avenir de ses enfants, car ce pharaon est si beau, si fort, inventeur de toute chose mais se retrouvant nu et n'ayant qu'un vague souvenir de son passé. Ainsi donc à la pauvreté de nos moyens s'ajoute l'arrogance de la Race des Seigneurs qui n’a pour devoir que de charger leurs esclaves des tâches desquelles leur trait pharaonique les déroge. Qui sont ces esclaves? Occidentaux et Chinois.


Pendant que les premiers doivent faire des guerres gratuitement, au nom d'un humanitarisme assassin, les seconds doivent leur fournir des routes, des hôpitaux...Aux Occidentaux, en tant que "nos colonisateurs" soumis aux colonisés, de veiller sur notre sécurité et aux pays émergents de "développer" l'Afrique pour nous. Dans ce jeu de rôles distribués par le Pharaon, l'Occident qui est, depuis les razzias négrières transatlantiques, chargé du développement continental, aurait échoué si lamentablement que la tâche revient naturellement aux nouveaux venus, les chinois et autres pays émergents drapés dans la vertu "d'un partenariat Gagnant-Gagnant". Comme si la colonisation occidentale, elle n'est pas, en termes de slogans, fondée sur le "gagnant-gagnant" adoré aujourd'hui sous les tropiques, car porté par de nobles pays qui seraient l'exact opposé des Occidentaux. Ainsi donc, sous la coupe d'un groupe armé de 3 à 4.000 hommes au Mali, tout s'est effondré. Le soldat, ce fameux militaire africain qui inspire tant de crainte aux civils, chargé de défendre le pays s'est fondu dans la masse en enlevant son treillis qu'il a enfouit dans le sol ou qu'il a brûlé au préalable. Est-ce étonnant? Toute le peuple Noir n'est-il pas pris en otage et immobilisé par des groupuscules violentes pilotées par des individus sans foi, ni loi, dénommés "chefs d'Etat" ou "Chefs de la Rébellion"?



Il est grand temps de commencer par réfléchir sur ce que nous sommes devenus en tant que peuple au fil de l’histoire. L’homme noir, arrogant dans l’ignorance, dans la méchanceté, dans le cynisme et surtout dans l’indifférence se contente trop souvent d’être dans la négation et dans le refus de se voir tel qu’il est dans ses immenses faiblesses. L’homme noir nie qu’il soit resté esclave, il nie qu’il soit resté colonisé, il nie qu’il soit faible, il se limite, au mieux des cas, à s’indigner dans la dispersion contre toute attaque verbale voire physique conduite par ses adversaires qui aurait dû le conduire à se souder à ses congénères et à agir de concert avec eux.


En aout 2012, nous écrivions ceci: "La condition nécessaire pour la vie est la capacité de se défendre. Quiconque perd son aptitude à se défendre n'a aucune chance dans un monde où seules dans les séries de dessins animés le Lion est ami avec la gazelle et seuls dans les livres des témoins de Jéhovah présentant un paradis où tous les êtres y accédant sont amis. Les sociétés désarmées et dispersées n'ont qu'une fin: l'extinction ou la servitude. Avant même de penser à progresser, les peuples doivent éviter d'être asservis, et lorsqu'ils sont déjà asservis, leur priorité doit être de briser leurs chaînes, de libérer les énergies ainsi confisquées afin de les réorienter vers la satisfaction des besoins locaux." Que dire de plus à l’heure actuelle?


Nicolas Sarkozy à qui beaucoup d’africains reprochaient son « l’homme africain n’est pas assez entré dans l’histoire », répondait, par la voix de Henri Guaino, qu’il n’avait fait que dire la vérité et qu’il n’attend que quelques années encore pour que ce célèbre discours de Dakar rentre définitivement dans l’histoire. Sarkozy invitait donc l’homme africain « immobile » dans son environnement à confier son destin, dans un pacte de servitude volontaire, à l’homme moderne angoissé, c’est-à-dire l’homme blanc qui n’avait pas attendu son consentement pour s’engager dans son œuvre de civilisation coloniale après celle accomplie au travers des chaînes de l’esclavage. Le président retraité a-t-il besoin de ce temps supplémentaire lorsqu’on voit qu’acculé, « l’homme africain » revendique son statut de colonisé qui impose à la France et à l’Occident alias la Communauté internationale à venir chasser des coupeurs de bras et de pieds, des destructeurs de mausolées et porteurs de la Charia préalablement aidés par les mêmes de ses terres ?


Chassée d’Afghanistan, la France brille en Afrique où elle est restée, selon les coloniaux, « une puissance africaine ». Brocardé pour sa nonchalance et pour son impuissance en France, François Hollande retrouve la virilité en Afrique où coup sur coup, il sauve le soldat Bozizé en Centrafrique et déclare la guerre au Mali, puis frappe en Somalie. Profondément divisée et aigrit contre un « gouvernement socialiste mou et flou" en France, globalement la classe politique française retrouve son unité voire son unanimité en Afrique. Oui, la France est une puissance africaine. Il faut être particulièrement aveugle pour ne pas le voir. Avec cette énième guerre joliment rebaptisée intervention, ce pays confirme cette puissance et, du fait des propos réjouis des uns et des autres, à commencer par ce qu’on appelle étrangement « les dirigeants africains », il trouve un justificatif supplémentaire à sa présence sous les tropiques : « si la France intervient, vous l’accusez d’intervenir et de colonialisme, si elle n’intervient pas, vous l’accusez de ne pas intervenir et d’être indifférent. Que voulez-vous au juste, ingrats ? » Voilà la phrase qui va nous revenir à la figure ces temps-ci. Et nous serons bien obligés de l’encaisser, car nous sommes des lâches et des dominés. Mais ces dominés là se pensent si beau et si important que leur terre ne mérite pas que leur vie lui soit dédiée. Après tout, diront les plus philosophes parmi nous, n’est-ce pas un juste retour des choses ? Quoi, « juste retour des choses ? ». Oui, en ce sens que « les Africains avaient fait des « guerres mondiales » aux côtés des européens, c’est donc notre tour de les appeler à nous aider ». Misère !!!


Dis-donc! Dans les années de Gnassingbé 1er au Togo, ripostant aux africains du Zaïre de Mobutu amoureux de "l'Animation", les africains de ce territoire chantaient "sans Eyadéma que serait le Togo? Sans Gnassingbé, le Togo serait perdu! Sans Eyadéma que serait le Togo? Sans Gnassingbé, le Togo serait perdu !". Aujourd'hui, l'ambiance en Afrique, d’une manière quasi-générale, rappelle ces moments de délire et de démission collective organisée faisant reposer la vie et l'avenir de toute la masse sur les frêles épaules d'un homme, le Timonier. Ce Deus ex-machina s'appelle aujourd'hui, selon les cas, la France, la «communauté internationale", la Chine, Jésus, Allah, la Bible, le Coran et quoi encore... Et si nous n'étions pas des colonies? Heureusement pour nous, nous sommes restés des colonies !



13 janvier 2013

Komla KPOGLI



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