jeudi 6 décembre 2012

Mezri Haddad







Biographie
Mezri Haddad, né le 2 juillet 1961 au Kram, est un journaliste, écrivain, philosophe et diplomate tunisien.

Docteur en philosophie morale et politique de la Sorbonne et premier candidat musulman à avoir été qualifié par le Conseil national des universités françaises comme maître de conférences en théologie catholique1, il est l'auteur de plusieurs essais portant principalement sur la politique et
la religion (islam et christianisme).

Il intervient régulièrement, surtout depuis 1990, dans la presse française (Le Figaro, Libération et Le Monde), belge (Le Soir et La Libre Belgique) ou suisse (La Tribune de Genève). Il a fait plusieurs apparitions sur France 24, LCI, Public Sénat, France Ô et Al Jazeera.

Il est également codirecteur de Daedalos Institute of Geopolitics, un think tank basé à Nicosie et qui a été créé à l'initiative du ministère chypriote des Affaires étrangères.

Formation et premières expériences

Mezri Haddad a suivi ses études primaires au Kram puis ses études secondaires au lycée technique de La Goulette. En juin 1978, il est exclu de tous les établissements secondaires de la république semble-t-il en raison de son activisme politique lors des événements du Jeudi noir[réf. nécessaire]. Il part alors en Algérie où il réussit le concours d'entrée à l'Institut national du génie mécanique à Boumerdès. L'Algérie lui accorde une bourse mais la Tunisie lui refuse — convention tuniso-algérienne oblige — l'autorisation de poursuivre ses études dans ce pays[réf. nécessaire] ; il regagne alors la Tunisie en décidant de renoncer définitivement aux études scientifiques et à son ambition de devenir ingénieur pour se consacrer exclusivement à la contestation du régime d'Habib Bourguiba.

C'est en 1979 que naît sa vocation pour le journalisme : il signe son premier article, intitulé « Un jeune tunisien très en colère », dans le quotidien La Presse de Tunisie. Ce n'est que trois ans plus tard qu'il signe son second article, intitulé « L'effet Wassila », dans Jeune Afrique paru le 20 octobre 1982 ; il y critique violemment la première dame de Tunisie. Arrêté puis pardonné, il entame une carrière de journaliste dans la presse officielle avec un passage éclair dans la revue Dialogue puis le quotidien L'Action Tunisienne, d'où il est renvoyé pour incompatibilité avec l'esprit de ce journal[réf. nécessaire] fondé par Bourguiba en novembre 1932 et qui est l'organe officiel du Néo-Destour.

Il trouve un point de chute au sein du magazine culturel et artistique de la radio-télévision tunisienne mais démissionne de ce magazine en janvier 1984 en pleines « émeutes du pain et quitte la Tunisie pour la France où il s'inscrit à la Sorbonne en choisissant la section de philosophie. En 1987, année de l'arrivée au pouvoir du président Zine el-Abidine Ben Ali, Mezri Haddad, longtemps opposé au régime de Bourguiba, accueille positivement le nouveau pouvoir et rend publiquement hommage à celui-ci[réf. nécessaire].
Études supérieures

En 1987, il obtient son DEUG en philosophie de Paris IV et, en 1988, décroche une licence de la même université. Il s'inscrit alors en sociologie et suit les cours des professeurs Raymond Boudon, François Bourricaud et Bernard Valade. Parallèlement, il participe durant trois années au séminaire de Dominique Chevallier consacré à l'histoire du monde arabe. En 1989, il soutient sa maîtrise de philosophie morale et politique sur « L'idéologie communiste et l'islamisme : analyse et perspectives » dans laquelle il démontre les points de convergences entre les totalitarismes communiste et théocratique.

En 1990, il obtient son DEA sur le thème du « Matérialisme historique et luttes des classes chez Karl Marx ». La même année, il s'inscrit en thèse de doctorat, toujours à Paris IV (section philosophie morale et politique). Contre l'avis de ses professeurs, il choisit de travailler sur la thématique du religieux et du politique dans l'islam et le christianisme[réf. nécessaire]. « La problématique des rapports entre l'autorité spirituelle et le pouvoir temporel dans l'islam et dans le christianisme » est le sujet de la thèse de 1 200 pages qu'il soutient en 1997 pour obtenir son doctorat. Selon les membres du jury, par sa démarche comparatiste et pluridisciplinaire, Haddad montre que le théologico-politique est le problème majeur de toutes les religions et de toutes les civilisations[réf. nécessaire] ; la « maladie théocratique » ne serait donc pas une particularité islamique.
Carrière professionnelle
Journaliste

Après ses premiers pas dans la presse du Néo-Destour, et une fois installé en France, il est longtemps le correspondant permanent du magazine tunisien Réalités. Il en devient éditorialiste et chroniqueur jusqu'à sa démission en 1991 pour atteinte à sa liberté d'expression. Depuis son retour en Tunisie en 2000, il y est redevenu chroniqueur. Actuellement, il est l'un de ses quatre conseillers.
Universitaire

Entre 1989 et 1993, il sert comme assistant du professeur Jacqueline Brisset, à Paris II, en philosophie du droit et en histoire des idées politiques. De 1991 à 1992, Pierre Aubenque, grand spécialiste d'Aristote, le prend comme chercheur au Centre de recherche sur la pensée antique, laboratoire associé au CNRS.

De 1999 à 2001, il est chercheur au Centre d'histoire des sciences et des philosophies arabes et médiévales, laboratoire dirigé par Roschdi Rasched et associé au CNRS. À la même époque, il est enseignant d'histoire (ATER) à Paris VII, affecté à l'UFR « Géographie et sciences de la société ». De 2003 à 2005, il est chargé d'enseignement vacataire à HEC dans un séminaire baptisé « Religions et cultures ».
Activités politiques

Très tôt, Haddad prend ses distances avec le régime du président Zine el-Abidine Ben Ali. En 1989, il constate que l'euphorie, l'unanimisme et le culte de la personnalité menace déjà le nouveau pouvoir[réf. nécessaire]. Entre 1989 et 1991, il est l'un des rares intellectuels à contester ouvertement, dans la presse tunisienne (Réalités), la dérive autoritaire du régime[réf. nécessaire]. Il appelle au dialogue avec l'opposition, au respect des droits de l'homme et à l'ouverture démocratique. Interdit de parole en Tunisie, il poursuit son combat dans le quotidien Libération, le seul journal à lui ouvrir ses colonnes à l'époque[réf. nécessaire].

Après trois années d'attente, la France lui accorde le statut d'exilé politique. Respecté par toutes les mouvances de l'opposition et sans appartenir à aucune d'entre elles, Mezri Haddad devient une pièce maîtresse de l'échiquier politique tunisien[réf. nécessaire]. À chaque article dans Libération, il déclenche une crise diplomatique entre la France et la Tunisie[réf. nécessaire]. Un ancien ministre dit de lui qu'il était le véritable cerveau de l'opposition tunisienne en exil ainsi que le pont entre celle-ci et l'opposition de gauche à l'intérieur du pays[réf. nécessaire].

Pourtant, dans une interview donnée au quotidien belge Le Soir en 1997, il surprend en annonçant son désaccord avec une opposition qu'il soupçonne de compromission avec les islamistes mais ne s'explique pas sur les raisons profondes qui l'ont amené à la rupture avec l'opposition, encore moins sur les causes de son ralliement à Ben Ali, au point d'en devenir l'un des intellectuels le plus écouté. Deux hommes influents semblent avoir joué un rôle décisif dans le rapprochement entre le président Ben Ali et Mezri Haddad : Mohamed Masmoudi, ancien ministre des Affaires étrangères à l'époque de Bourguiba, et Béchir Ben Yahmed, patron de Jeune Afrique[réf. nécessaire]. Dès 1998, ce dernier le persuade de rompre l'exil et de rentrer en Tunisie mais Haddad ne revient au pays qu'en avril 2000, quelques jours avant le décès de Bourguiba. Il rencontre alors le président Ben Ali et plaide pour une amnistie générale et le retour des exilés politiques en Tunisie[réf. nécessaire], notamment Ahmed Ben Salah et Mohamed Mzali.

Avec son nouvel ouvrage, Non Delenda Carthago. Carthage ne sera pas détruite publié aux éditions du Rocher en 2002, il s'en prend violemment à l'opposition mais n'épargne pas non plus certains hommes du pouvoir, notamment son aile dure qu'il accuse d'avoir radicalisé le régime et d'avoir considérablement limité la liberté d'expression[réf. nécessaire]. Il continue néanmoins de défendre le régime tunisien, justifiant cet appui par son choix du réformisme libéral et du gradualisme démocratique et son rejet des alternatives révolutionnaires qui ne profiteraient, selon lui, qu'aux éléments les plus réactionnaires, notamment aux intégristes.

En novembre 2009, Mezri Haddad est nommé par le président Ben Ali comme ambassadeur de la Tunisie auprès de l'Unesco, pourvoyant un poste vacant depuis 19961. Face au soulèvement qui agite le pays, il prend d'abord fait et cause pour le régime jusqu'au 13 janvier 2011, déclarant que la révolte du peuple n'est en réalité que la révolte d'une « horde »2. Le 14 janvier, il annonce sa démission de son poste d'ambassadeur auprès de l'Unesco3, quelques heures avant l'annonce du départ du président Ben Ali.

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