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Pourquoi la pyramide financière basée sur l’exploitation du gaz de schiste aux États-Unis s’est-elle effondrée ? Quel est le coût de revient de cette matière première non traditionnelle ? À qui profite cette fièvre du schiste en Europe ?
La Bulgarie a décrété un moratoire sur la prospection du gaz de schiste. La Roumanie, au contraire, veut forer un puits à côté d’un lac souterrain qu’elle possède en commun avec la Bulgarie. La Pologne, la Lituanie et l’Ukraine voient dans ce gaz une alternative au gaz russe. La politique énergétique polonaise est axée sur l’extraction du gaz de schiste : de tels projets ont reçu une aide de 500 millions de dollars pour l’année 2013. Par contre, l’Allemagne et la France ont interdit la prospection de ce combustible non traditionnel. Pourquoi y a-t-il en Europe une telle divergence d’opinions ? Qu’est-ce qui freine exactement la prospection de ce gaz ? Pourrait-il devenir une menace aux contrats à long terme de Gazprom ?
Valeri Nenakhov, expert dans le domaine du gaz de schiste et directeur du centre de génie et d’innovation Geogazconsult, répond à toutes ces questions.
« Le fait que la Bulgarie ait décrété un moratoire et que la Roumanie ait autorisé le forage n’est pas un problème d’écologie. C’est une pure bataille politique. Les Bulgares pourraient montrer leur mécontentement : « Vous allez saccager notre lac ! » En effet, en cas de propagation non contrôlée de la fissure, les substances toxiques injectées dans l’eau lors de la fracturation hydraulique pourraient tout à fait se retrouver dans ce réservoir d’eau douce. Tout cela dépend de la Roumanie. Si elle est prête à payer des millions de dollars pour des études géophysiques complexes, à utiliser du matériel coûteux, à étudier les massifs montagneux, il serait donc possible de pencher le puits dans n’importe quelle direction afin d’éviter la pollution des eaux souterraines. »
En effet, le prix de ne fut-ce qu'une installation de test s’élève à 17 millions de dollars ! Afin d’estimer les réserves exploitables, il faut forer horizontalement sur 300 mètres, casser la roche à l’aide d’eau sous pression (fracturation hydraulique), injecter dans le puits des liquides spéciaux et du sable pour finalement extraire le gaz. Le liquide injecté doit posséder certaines caractéristiques indispensables, c’est pourquoi on lui ajoute des réactants toxiques.
« Que s’est-il passé au Texas sur le gisement Barnette Shale ? Les vaches ont bu des eaux artésiennes et en sont mortes. Que dites-vous du méthane dans les robinets dans les régions de prospection du gaz de schiste ? Il suffit d’approcher une allumette du robinet et l’eau s’enflamme ! Et c’est aux États-Unis, où l’on a dépensé des milliards de dollars pour des études préalables et où l’on a même filmé le documentaire Gasland. Toutefois, 30 ans après le début de l’exploitation des gisements de gaz de schiste, les Américains ont refusé des études. Ils ne font que forer. Et pourquoi ? Et bien parce que le gaz de schiste n’est plus rentable si l’on dépense de l’argent pour faire de la prospection. Cette entorse au règlement peut passer sur la vaste étendue américaine, mais pas en Europe où la population est très dense ».
Il faut croire que la France, la Hongrie, la Bulgarie, la Suisse et la Suède ont pris conscience du danger. Peter Altmaier, ministre allemand de l’Environnement, s’est aussi prononcé contre la fracturation hydraulique. La Pologne, qui est la réserve de gaz de schiste de l’Europe, est la plus enthousiaste. Selon les premières estimations, elle en posséderait 5,3 milliards de milliards de mètres cubes. Toutefois, ce chiffre a été revu à la baisse à 1,92 milliard de milliards, ce qui n’est pas mal non plus.
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La rédaction