vendredi 7 décembre 2012

Egypte, Tunisie : le printemps arabe a-t-il vraiment dit son dernier mot ?

Les grands vainqueurs des élections post-printemps arabe en Tunisie et en Egypte sont incontestablement les islamistes. Seulement, ceux qui se sont battus contre eux lors du printemps arabes n’ont pas rangé leurs pancartes. En Egypte, ils ont réinvesti la place Tahrir alors qu’un appel à la grève a été lancé en Tunisie. Pour Jean-Marcel Bouguereau, ce n’est pas encore l’hiver.
C’est une nouvelle étape de ces “printemps arabes” qui ont connu leur automne et font craindre qu’ils s’acheminent vers leur hiver. Après la victoire des islamistes, cette révolution qu’on avait pu croire interrompue est-elle en train de repartir ? Deux configurations distinctes : l’Égypte et la Tunisie. L’Égypte, où le président a décidé de jouer l’épreuve de force en maintenant son référendum sur une nouvelle Constitution. Objet : La séparation du religieux et du politique.
On a peut-être insuffisamment commenté la discussion, en Tunisie, d’une Constitution qui ne fait en rien référence à Dieu. Pourtant le gouvernement est à majorité islamique, mais l’opposition est incarnée par une force syndicale constituée dans la lutte pour l’indépendance : l’UGTT. Et la présidence est occupée par un vieil opposant et militant des droits de l’homme, Moncef Marzouki – alors qu’en Égypte, les Frères musulmans ont été les seuls, sous Moubarak, à occuper le terrain par leurs activités caritatives, les libéraux et la gauche n’étant qu’une frange urbaine largement minoritaire.
Mais les islamistes, en Égypte et en Tunisie, auréolés de l’onction du suffrage universel, ont marché sur la queue d’un lion qui semblait assoupi. En Égypte, le président s’est adjugé les pleins pouvoirs pour faire adopter une nouvelle constitution accusée de menacer des droits pour lesquels les manifestants de la place Tahrir s’étaient battus, la liberté d’expression et l’état de droit, avec application de la loi islamique, au point que plusieurs journaux ont titré “non à la dictature”.
Ce sont deux Égypte qui se sont violemment heurtées devant le palais présidentiel, celle des “Frères” et celle des libéraux et de la gauche. À l’intérieur de l’État, des fissures se font jour, notamment dans l’appareil judiciaire que Morsi entend mettre au pas. Morsi veut passer en force même si, électoralement, à l’épreuve du pouvoir, les islamistes ont déçus les espoirs de cette Égypte profonde sur laquelle il s’appuie.
La configuration est très différente en Tunisie où le président Marzouki s’est improvisé médiateur entre le gouvernement et le principal syndicat, sorte de Solidarnosc tunisien, qui a appelé à une grève générale le 13 décembre. L’UGTT réclame l’arrestation des militants islamiques qui l’ont attaquée, ainsi que la dissolution d’une milice favorable au pouvoir. À la veille du premier anniversaire de la révolution, cette protestation va cristalliser les ressentiments des Tunisiens et leurs espoirs déçus face aux difficultés économiques. Égypte et Tunisie : deux configurations qui montrent que la voie iranienne n’est pas le passage obligé de ces révolutions.

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