Bug ou pas bug ? La question reste sur dans les esprits mardi matin, alors queFacebook a démenti, dans la soirée du lundi 24 septembre, que des messages privés de ses utilisateurs ont été rendus publics. Plusieurs évoquent même une "hallucination collective" qui serait liée non pas à un dysfonctionnement, mais à un simple changement de fonctionnement dans la présentation des messages (lire sur 20minutes.fr : Anatomie d'un faux bug).
Pourtant, le doute persiste. Le gouvernement a demandé à la direction de Facebook de s'expliquer dès que possible auprès de la CNIL au sujet d'une possible défaillance.
Et surtout, de nombreux utilisateurs du réseau social le plus populaire de France (26 millions d'inscrits dans le pays selon Nielsen) restent persuadés que des messages, dont la vocation originale était de rester privés, sont devenus consultables par leurs amis (la méthode pour masquer l'ensemble des messages se trouve dans notre précédent article).
Soyons clairs : parmi tous les témoignages reçus par Le Monde.fr, aucun ne permet actuellement de prouver avec une certitude absolue, grâce à des captures d'écran ou d'autres moyens, qu'un mail privé entre deux utilisateurs soit passé partiellement ou complètement public sur le mur d'un d'entre eux.
Mais la question reste également de savoir si de fournir de telles preuves est possible, surtout si, dans la base de données de Facebook, la nature même ou la visibilité des messages a été modifiée. "Comment le prouver, car ces messages, qui n'étaient à priori pas sur mon mur au départ, ont disparu de ma boite de réception : c'est comme si je n'avais envoyé aucun message entre le 19 mai et le 7 octobre 2009…" s'étonne une de nos lectrices, avec la certitude que ces posts étaient originalement privés - malgré les explications de Facebook comme quoi il s'agissait de "messages sur le mur" tout à fait publics.
Au reste, c'est principalement le ressenti de cette expérience qui génère tant de bruit et d'interrogations. Qu'il s'agisse d'un véritable dysfonctionnement (relayé par plusieurs témoins crédibles, selon l'expression de nos collègues du Huffington Post, et également par plusieurs journalistes de notre rédaction) ou plus simplement d'une évolution maladroite des règles de gestion des messages ou de profils chez Facebook ("it’s not a bug, it’s a feature"), l'énervement est réel chez les utilisateurs qui nous ont contacté.
La découverte des messages sur leur profil qui, selon eux, n'avaient pas lieu d'y être, vient s'ajouter à de nombreuses interrogations persistantes sur la protection de leur vie privée.
Et cet "accroc ultime", selon Slate.fr, de se transformer en "scandale" et de pousser nos lecteurs à "effacer tous leurs messages de Facebook", voir à purement"désactiver leur compte" face à ce "bug qui ne pardonnera pas" - même s'ils n'avaient pas hésité, jusque là, à raconter toute leur vie sur le réseau, comme le pointe notre blogueur Jean-March Manach' dans son article : "Facebook et le paradoxe de la vie privée".
Retrouvez ci-dessous une sélection parmi la centaine de témoignages qui nous sont parvenus depuis lundi soir :
Mélanie, 25 ans : "J'admets certaines utilité de ce réseau. Hier apprenant la nouvelle j'ai vérifié mon mur ainsi que certains d'amis : nous avions bien tous des messages privés publiés. Cela ne m'a pas plu. Malgré le peu de choses compromettantes, il n'est pas normal que des messages privés, de quelque nature que ce soit, soient publiés. La réponse de Facebook se montre peu respectueuse des utilisateurs ! J'ai pour le moment désactivé mon compte."
Internaute parisienne : "Sur le mur de mon copain, est apparu un ancien message d'une de ses amies (datant de 2007) : "Salut, merci pour l'ajout. Alors comment ça se passe avec les pétasses de la XXX (nom de l'entreprise)." Heureusement il n'est plus dans la société en question... mais a gardé contact avec ses anciennes collègues..."
Noémie : "Oh, rien de bien méchant. Des mots d'amour qu'on a oubliés depuis longtemps, des souvenirs qu'on n'aurait autant pas voulu voir resurgir au grand jour, surtout au vu des 300 et quelques "amis" du réseau. Deux, trois clics, et je désactive mon compte, pour être sûre, sûre et certaine cette fois, que personne ne pourra lire ces quelques mots que j'aurais voulu garder rien que pour moi. Non, rien de grave, juste un petit coup au cœur, comme aurait pu m'en donner n'importe quel autre souvenir sur lequel j'aurais remis la main par inadvertance. Sauf que, ce qui irrite dans ces cas-là, c'est que malgré la certitude absolue que ce message était tout à fait privé, on peut lire les affirmations des dirigeants Facebook, qui nous affirment que c'est de notre faute, que nous sommes paranos, que nous ne savons plus distinguer communication privée et publique, que ces messages étaient bien destinés à être lus de tous, quoi, vous les aviez donc oublié ? Plus grave que la violation de la vie privée, la mauvaise foi qui va avec. C'est décidé, je ne réactiverai pas mon compte Facebook."
Yasser : "Il faut tout de même relativiser la gravité de la faille : d'une part, tous les messages ne sont pas affichés, seulement quelques uns, et d'autre part, ils sont affichés sur la timeline à la date à laquelle ils ont été échangés... c'est-à-dire il y a quatre ans. Autrement dit, à moins que certains de vos "amis" ne soient de grands adeptes de la timeline et aiment à parcourir votre passé sur Facebook en remontant jusqu'en 2008, l'ampleur des dégâts est à relativiser. Toutefois, j'espère que Facebook réglera ce problème le plus vite possible !"
Colombine, 22 ans : "Je viens en effet d'être affectée par ce "bug" scandaleux, comme la majeure partie de mes amis que je tente de prévenir par tous les moyens. J'en recense une bonne centaine pour l'instant. Non seulement ce bug est extrêmement grave mais le fait que Facebook mente délibérément en affirmant qu'il s'agit de messages publics ayant ressurgi me paraît au delà de l'imaginable. Il s'agit bien de messages privés ayant resurgi sur la Timeline et affirmer le contraire est un mensonge et un manque de respect évident des utilisateurs. Je suis scandalisée et j'espère qu'il existe des recours accessibles contre Facebook pour cette faute extrêmement grave. Il s'agit d'une rupture du contrat passé lors de la création du compte. Au moins cela est une bonne leçon : rien de ce qui transite d'un manière ou d'une autre par Internet n'est à l'abri de ce genre de problème, qu'il s'agisse de bug ou de hack. A garder à l'esprit dans mes correspondance futures. Je réfléchis à désactiver mon compte, mais Facebook a tellement étendu son réseau aujourd'hui que cela me porterait préjudice, même pour mes études. Bonne prise de conscience de la méga puissance de ce réseau, et du fait qu'il détient le pouvoir de détruire nos vies."
Camille, 21 ans : "Je suis une grande adepte de Facebook depuis 2006. (...) J'ai vécu les différentes mises à jour que j'ai détestées, aimées, puis regrettées. Facebook c'est un petit peu ma vie à l'écran, mon réseau, mes photos, ma mémoire, pour mes potes c'est même leur job ! Mais voila, je viens de désactiver mon compte, après avoir eu la surprise de découvrir en fin d'après-midi que la plupart de mes conversations privées avaient été rendues publiques non seulement sur ma Timeline, mais sur celle des amis auquels je m'adressais. Des conversations on ne peut plus intimes avec mon ancien petit ami qui vivait loin, de longs mails enflammés et de petites engueulades au beau milieu des souhaits de mon anniversaire en 2008... des mails dans lesquels je raconte mes expériences, mes joies, mes tristesses, mon orientation sexuelle sur la Timeline de ma meilleure amie... Sentiment de honte, je me sens salie, trahie par la technologie."
Michaël Szadkowski (@szadkowski_m)
PS : l'enquête participative continue, n'hésitez pas à nous envoyer vos "preuves" à photoslemonde@gmail.com ; et merci à Clément Elbaz en commentaire ci-dessous, qui propose le procédé suivant :
"L’idée est de fournir une capture d’écran d’un email de type « Jacques Dupont sent you a message on Facebook » datant de 2009, corrélé avec la capture d’écran du même message désormais sous forme de message sur le Wall sur la version actuelle de Facebook.
1/ Avoir son propre compte affecté par le bug. L’avoir constaté sur un autre profil ne suffit pas. 2/ Disposer d’une adresse mail liée à Facebook en 2009 dans laquelle vous n’avez pas eu à supprimer de messages et dans laquelle il est possible de rechercher facilement (Gmail, Hotmail, ou Yahoo seront parfaits). 3/ Avoir conservé à l’époque le réglage mail par défaut de 2009 de Facebook, qui envoyait un email pour chaque post écrit sur votre Wall (« Jacques Dupont wrote on your Wall »), et pour chaque message privé qui vous est envoyé (« Jacques Dupont sent you a message on Facebook »)."
Personnellement, mon compte n’a pas été affecté par le problème, par contre je suis sûr et certain d’avoir vu sur les Walls des autres gens des choses qui n’étaient pas des posts Walls. Il serait intéressant que quelqu’un poste ce genre de corrélation de capture d’écran."
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