Cela a tout l'air d'un miracle. A l'intérieur d'un vieux carton, jeté au milieu d'un garage empli de détritus, dans un sac en plastique déchiré, apparaît la reliure d'un manuscrit. La photo, prise par la police nationale, a de quoi surprendre, s'agissant du Codex Calixtinus, ou "Livre de Saint-Jacques", un manuscrit historique, artistique et religieux du XIIe siècle d'une valeur "inestimable" selon les experts.
Près d'un an jour pour jour après qu'il a été dérobé dans la cathédrale de Saint-Jacques-de-Compostelle, ce joyau du patrimoine culturel de l'Espagne a été retrouvé, mercredi 4 juillet, dans la propriété d'un électricien, ancien employé de la cathédrale durant vingt-cinq ans, à seulement 5 kilomètres de la célèbre cité galicienne.
Malgré le peu de soin avec lequel il était gardé, le livre, considéré comme le premier guide de voyage de l'histoire – il décrit le chemin de Compostelle avec un luxe d'informations sur l'emplacement des églises, les sources d'eau potable, les coutumes locales et l'aspect des habitants – serait en parfait état, selon la brigade du patrimoine historique de la police.
L'électricien suspecté du vol, Manuel Fernandez Castineiras, avait été arrêté la veille, avec sa femme, son fils et la petite amie de ce dernier. A son domicile, la police a trouvé 1,2 million d'euros en espèces, des clefs des dépendances de la cathédrale et d'autres manuscrits et objets disparus, dont un précieux livre d'heures.
L'homme ne travaillait plus pour la cathédrale depuis plus d'un an, après qu'il eut été remercié pour des motifs à éclaircir. Selon le ministère de l'intérieur, il aurait falsifié un contrat pour se présenter comme un employé fixe de la cathédrale, alors qu'il travaillait à son compte. Mais il pourrait aussi avoir été suspecté par les religieux du vol des offrandes des fidèles lors des messes.
"JUGEMENTS TÉMÉRAIRES"
Selon le délégué du gouvernement en Galice, c'est pour se venger de ce licenciement, et parce qu'il réclamait 40 000 euros aux religieux pour des travaux non payés, que l'électricien aurait dérobé le précieux Codex.
A moins que des motifs plus personnels ne soient aussi entrés en ligne de compte, comme le sous-entend le journal El País, qui affirme qu'entre l'électricien d'une soixantaine d'années et le religieux octogénaire chargé de garder le Codex s'était nouée "une étroite relation personnelle", jusqu'à ce qu'une mésentente en fasse "des ennemis à vie".
Le mystère demeure aussi sur la provenance de l'argent trouvé chez le principal suspect. D'autres trésors dérobés seraient-ils perdus dans la nature ?
A l'époque, le forfait avait tourné au scandale, le coffre, situé à l'abri des regards et rarement présenté au public, n'ayant pas été forcé. Selon la presse, les clefs se trouvaient même posées dessus. Aucune effraction n'avait été commise, aucune caméra de sécurité n'était installée dans la salle et le manuscrit n'était pas assuré. L'église avait même été incapable de donner la date de la disparition du Codex, constatée le 5 juillet 2011, après cinq jours durant lesquels personne n'avait vérifié sa présence.
La négligence des religieux chargés de garder ce "trésor" - qui avait été estimé à un milliard de pesetas en 1990 (6 millions d'euros) - avait alors été pointée du doigt. Tout comme les déclarations douteuses, omissions et autres obstacles que certains ecclésiastiques avaient semés durant l'enquête.
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La rédaction