L'essayiste français Dominique Venner s'est suicidé mardi dernier dans la cathédrale Notre-Dame de Paris devant plusieurs centaines de touristes et croyants. Dans une lettre rédigée juste avant sa mort il explique que son suicide est un geste de révolte contre l'oppression des Français par les immigrés. Cet écrivain de 78 ans a mis fin à ses jours peu de temps avant une nouvelle manifestation contre le mariage homosexuel - auquel il s'opposait.
L'essayiste n'a pas précisé ce qui l'avait poussé à régler ses comptes avec la vie au nom d’un idéal politique bafoué. "Je ne pense pas que l'on puisse lier son suicide à cette affaire de mariage homosexuel, cela va bien au-delà", a déclaré l'éditeur de Venner, Pierre-Guillaume de Roux.
Selon lui, l'acte de Venner est politique et rapproche l'essayiste de l'auteur japonais Yukio Mishima, qui s'est suicidé en 1970.
Quelle "léthargie" voulait rompre Venner et arrivera-t-il à changer la politique française ?
Le contexte
Le jour de sa mort, Venner a publié sur son blog un article débordant d'indignation. "Une loi infâme, une fois votée, peut toujours être abrogée", a-t-il écrit au sujet du mariage homosexuel, associant immédiatement ce thème à un autre sujet sensible : "Je viens d’écouter un blogueur algérien annoncer que de tout façon dans quinze ans les islamistes seront au pouvoir en France et supprimeront cette loi".
Le mariage entre couples de même sexe n'était certainement pas la seule "épine" dans le pied de Venner – ses convictions ont souffert "depuis 40 ans des politiciens et gouvernements de tous les partis (sauf le FN), qui y ont travaillé activement, en accélérant par tous les moyens l’immigration afro-maghrébine". L'écrivain voyait une solution dans les "gestes nouveaux, spectaculaires et symboliques pour ébranler les somnolences, secouer les consciences anesthésiées et réveiller la mémoire de nos origines". Venner aurait pu décider de faire ressusciter cette mémoire par son suicide mais il n'a invité personne d'autre à suivre son exemple.
D'ailleurs, les critiques n'associent pas "l'emprise des islamistes" sur la France uniquement à l'immigration mais aussi à l'afflux actif de capitaux arabes dans le pays. La polémique a notamment surgi pendant la campagne présidentielle de 2012 mais elle est restée en dehors des débats des favoris. Le candidat Jacques Cheminade, qui n'a récolté que 0,25% des voix, avait alors dénoncé à la télévision le club de football "Paris-Saint-Qatar" – c'est ainsi qu'il appelait le Paris-Saint-Germain racheté par des investisseurs qataris, ainsi que l'achat des hôtels français de luxe par les grandes fortunes du Golfe.
Un héros ?
L'étendard de Venner a été immédiatement repris par Marine Le Pen, leader du Front national. "C'est un geste de désespoir positif", a-t-elle affirmé, soutenant l'indignation de Venner concernant "l'invasion migratoire massive". Bien que la représentante des nationalistes français espère que le monde entier entende l'appel de l'essayiste, peu lui ont exprimé leur soutien en France. Près d'une centaine d'activistes d'extrême-droite ont fêté hier leur héros en se rassemblant devant la cathédrale Notre-Dame de Paris et en déposant des fleurs devant la statue du premier empereur français, Charlemagne.
Le nombre de sympathisants est évidemment plus élevé. Par tradition tacite, les Français ne s'empressent pas de soutenir publiquement l'extrême-droite : peu ont ouvertement parlé de leur intention de voter pour Le Pen en 2012, ce qui n'a pas empêché à la patronne du FN de terminer la course à la troisième place avec 17,9% des voix au premier tour. Cependant, hormis la lutte contre les immigrés, les extrémistes de droite accordent une immense importance aux valeurs sociales telles que la famille et le catholicisme. Et Venner, qui a laissé une famille derrière lui et a choisi la plus grande cathédrale française pour se suicider n'a certainement pas été loué à l'unanimité par les partisans du FN.
Pourquoi Notre-Dame ?
"Je choisis un lieu hautement symbolique que je respecte et j'admire", a écrit Venner avant son suicide, à son ami Bernard Lugan, historien spécialiste de l'Afrique. La cathédrale Notre-Dame de Paris est indéniablement un trésor des valeurs traditionnelles de la civilisation catholique.
Mais il est difficile de voir la logique dans cette tentative de défendre des valeurs en profanant un lieu sacré où se trouve la couronne d'épines du Christ. L'écrivain s'est suicidé devant l'autel et, selon les prêtres, immédiatement après le suicide une messe a été célébrée pour rétablir la sainteté de la cathédrale profanée.
Venner a commis une autre erreur de calcul idéologique : il y a trois mois les féministes de Femen avaient fait parler d'elles après un acte commis, justement, dans la cathédrale Notre-Dame. Huit jeunes femmes étaient venues dans l'église à moitié nues pour se réjouir de la "démission" du pape Benoît XVI, en criant en anglais "Pope no more" (Plus de pape). On pouvait lire sur le torse et sur le dos des ces femmes des slogans qui sont loin de rejoindre la cause de Venner : "No homophobe", "Crise de la foi" ou encore "Bye bye Benoît".
Finalement, son suicide a tout de même été en tête de l'actualité dans l'ensemble des médias français et étrangers. En 2012 Notre-Dame de Paris a été visitée par 14 millions de personnes et 1 500 personnes se trouvaient à l'intérieur au moment du suicide, avant d'être évacuées.
Quel impact politique ?
Les hommes politiques n'ont pas pris au sérieux l'avertissement de Venner, qui trouvait plausible la suprématie future des islamistes en France. Le ministre de l'Intérieur Manuel Valls a qualifié ce suicide d'acte "désespéré", sans faire de commentaires sur ses motivations politiques. Le premier secrétaire du Parti socialiste Harlem Désir a jugé que Venner avait agi comme un "marginal d'extrême-droite", "justifié" par Marine Le Pen.
La politique des dirigeants français actuels, appuyée sur les promesses de campagne de François Hollande, ne change pas en dépit du mécontentement d'une partie de la population. En 2010, les grandes manifestations qui avaient paralysé la France n'avaient pas permis de changer la réforme des retraites initiée par le gouvernement de Nicolas Sarkozy. En arrivant au pouvoir en 2012 l'opposition socialiste a apporté des changements partiels à la réforme sans pour autant renverser le cours de l'histoire.
Cette fois Hollande a promis le mariage des homosexuels et les manifestations d’opposition ne permettront pas de briser la volonté du gouvernement. L'acte isolé d'un écrivain désespéré n'y changera rien non plus.
De plus, même les activistes de la Manif pour tous, qui comptent organiser une nouvelle marche contre le mariage gay dimanche prochain, ne soutiennent pas Venner. "C'est un acte personnel isolé, très violent, spectaculaire et très désespéré. Il n'était pas dans notre mouvance", a déclaré Frigide Barjot, leader de la Manif pour tous.
L’opinion de l’auteur ne coïncide pas forcément avec la position de la rédaction Ria Novosti
L'essayiste n'a pas précisé ce qui l'avait poussé à régler ses comptes avec la vie au nom d’un idéal politique bafoué. "Je ne pense pas que l'on puisse lier son suicide à cette affaire de mariage homosexuel, cela va bien au-delà", a déclaré l'éditeur de Venner, Pierre-Guillaume de Roux.
Selon lui, l'acte de Venner est politique et rapproche l'essayiste de l'auteur japonais Yukio Mishima, qui s'est suicidé en 1970.
Quelle "léthargie" voulait rompre Venner et arrivera-t-il à changer la politique française ?
Le contexte
Le jour de sa mort, Venner a publié sur son blog un article débordant d'indignation. "Une loi infâme, une fois votée, peut toujours être abrogée", a-t-il écrit au sujet du mariage homosexuel, associant immédiatement ce thème à un autre sujet sensible : "Je viens d’écouter un blogueur algérien annoncer que de tout façon dans quinze ans les islamistes seront au pouvoir en France et supprimeront cette loi".
Le mariage entre couples de même sexe n'était certainement pas la seule "épine" dans le pied de Venner – ses convictions ont souffert "depuis 40 ans des politiciens et gouvernements de tous les partis (sauf le FN), qui y ont travaillé activement, en accélérant par tous les moyens l’immigration afro-maghrébine". L'écrivain voyait une solution dans les "gestes nouveaux, spectaculaires et symboliques pour ébranler les somnolences, secouer les consciences anesthésiées et réveiller la mémoire de nos origines". Venner aurait pu décider de faire ressusciter cette mémoire par son suicide mais il n'a invité personne d'autre à suivre son exemple.
D'ailleurs, les critiques n'associent pas "l'emprise des islamistes" sur la France uniquement à l'immigration mais aussi à l'afflux actif de capitaux arabes dans le pays. La polémique a notamment surgi pendant la campagne présidentielle de 2012 mais elle est restée en dehors des débats des favoris. Le candidat Jacques Cheminade, qui n'a récolté que 0,25% des voix, avait alors dénoncé à la télévision le club de football "Paris-Saint-Qatar" – c'est ainsi qu'il appelait le Paris-Saint-Germain racheté par des investisseurs qataris, ainsi que l'achat des hôtels français de luxe par les grandes fortunes du Golfe.
Un héros ?
L'étendard de Venner a été immédiatement repris par Marine Le Pen, leader du Front national. "C'est un geste de désespoir positif", a-t-elle affirmé, soutenant l'indignation de Venner concernant "l'invasion migratoire massive". Bien que la représentante des nationalistes français espère que le monde entier entende l'appel de l'essayiste, peu lui ont exprimé leur soutien en France. Près d'une centaine d'activistes d'extrême-droite ont fêté hier leur héros en se rassemblant devant la cathédrale Notre-Dame de Paris et en déposant des fleurs devant la statue du premier empereur français, Charlemagne.
Le nombre de sympathisants est évidemment plus élevé. Par tradition tacite, les Français ne s'empressent pas de soutenir publiquement l'extrême-droite : peu ont ouvertement parlé de leur intention de voter pour Le Pen en 2012, ce qui n'a pas empêché à la patronne du FN de terminer la course à la troisième place avec 17,9% des voix au premier tour. Cependant, hormis la lutte contre les immigrés, les extrémistes de droite accordent une immense importance aux valeurs sociales telles que la famille et le catholicisme. Et Venner, qui a laissé une famille derrière lui et a choisi la plus grande cathédrale française pour se suicider n'a certainement pas été loué à l'unanimité par les partisans du FN.
Pourquoi Notre-Dame ?
"Je choisis un lieu hautement symbolique que je respecte et j'admire", a écrit Venner avant son suicide, à son ami Bernard Lugan, historien spécialiste de l'Afrique. La cathédrale Notre-Dame de Paris est indéniablement un trésor des valeurs traditionnelles de la civilisation catholique.
Mais il est difficile de voir la logique dans cette tentative de défendre des valeurs en profanant un lieu sacré où se trouve la couronne d'épines du Christ. L'écrivain s'est suicidé devant l'autel et, selon les prêtres, immédiatement après le suicide une messe a été célébrée pour rétablir la sainteté de la cathédrale profanée.
Venner a commis une autre erreur de calcul idéologique : il y a trois mois les féministes de Femen avaient fait parler d'elles après un acte commis, justement, dans la cathédrale Notre-Dame. Huit jeunes femmes étaient venues dans l'église à moitié nues pour se réjouir de la "démission" du pape Benoît XVI, en criant en anglais "Pope no more" (Plus de pape). On pouvait lire sur le torse et sur le dos des ces femmes des slogans qui sont loin de rejoindre la cause de Venner : "No homophobe", "Crise de la foi" ou encore "Bye bye Benoît".
Finalement, son suicide a tout de même été en tête de l'actualité dans l'ensemble des médias français et étrangers. En 2012 Notre-Dame de Paris a été visitée par 14 millions de personnes et 1 500 personnes se trouvaient à l'intérieur au moment du suicide, avant d'être évacuées.
Quel impact politique ?
Les hommes politiques n'ont pas pris au sérieux l'avertissement de Venner, qui trouvait plausible la suprématie future des islamistes en France. Le ministre de l'Intérieur Manuel Valls a qualifié ce suicide d'acte "désespéré", sans faire de commentaires sur ses motivations politiques. Le premier secrétaire du Parti socialiste Harlem Désir a jugé que Venner avait agi comme un "marginal d'extrême-droite", "justifié" par Marine Le Pen.
La politique des dirigeants français actuels, appuyée sur les promesses de campagne de François Hollande, ne change pas en dépit du mécontentement d'une partie de la population. En 2010, les grandes manifestations qui avaient paralysé la France n'avaient pas permis de changer la réforme des retraites initiée par le gouvernement de Nicolas Sarkozy. En arrivant au pouvoir en 2012 l'opposition socialiste a apporté des changements partiels à la réforme sans pour autant renverser le cours de l'histoire.
Cette fois Hollande a promis le mariage des homosexuels et les manifestations d’opposition ne permettront pas de briser la volonté du gouvernement. L'acte isolé d'un écrivain désespéré n'y changera rien non plus.
De plus, même les activistes de la Manif pour tous, qui comptent organiser une nouvelle marche contre le mariage gay dimanche prochain, ne soutiennent pas Venner. "C'est un acte personnel isolé, très violent, spectaculaire et très désespéré. Il n'était pas dans notre mouvance", a déclaré Frigide Barjot, leader de la Manif pour tous.
L’opinion de l’auteur ne coïncide pas forcément avec la position de la rédaction Ria Novosti
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