Face au manque de solidarité du monde arabo-musulman, le Mali se demande s’il ne faut pas rétablir ses relations diplomatiques avec Israël.
Les derniers développements de la crise qu’il traverse devraient donner au Mali l’occasion d’assouplir les principes qui sous-tendent sa diplomatie et réajuster sa carte diplomatique en y intégrant Israël.
«Qu’on nous dise où étaient ces donneurs de leçons le jour où un couple victime d’une justice inique et expéditive était lapidé à mort, soit disant pour adultère? Où étaient donc ces voix lorsqu’à Aguel Hock des soldats de l’armée régulière malienne étaient égorgés par dizaines voilà un an? ».
Le Président de la Transition, Dioncounda Traoré, n’avait pas de mots assez forts, à la clôture du dernier sommet de l’Union Africaine, pour dénoncer l’hypocrisie des premiers responsables de certains pays, surtout du monde arabo-musulman.
C’était lundi 27 janvier au siège de l’Union Africaine, à Addis Abeba, devant une auguste assemblée de chefs d’Etat et de gouvernement africains et de hautes personnalités.
Il évoquait bien entendu la sortie du Président égyptien Mohamed Morsi, qui n’a pas hésité à condamner l’intervention française qui a été jugée salutaire par les Maliens, car elle a permis de stopper la dangereuse progression des narco-jihadistes et d’éviter au Mali de sombrer dans le chaos, avec des conséquences catastrophiques pour la stabilité de l’ensemble des pays de l’Afrique de l’Ouest.
En Tunisie, même son de cloche qu’en Egypte.
Pour tout dire, du Maghreb au Machreck, la réaction du monde arabo-musulman fut une véritable déception pour les Maliens, qui s’attendaient à l’expression d’une solidarité agissante de la part de la Ummah islamique. Dans le meilleur des cas, les pays arabes se sont emmurés dans un silence assourdissant.
Seul le Maroc semble faire figure d’exception.
Sans préjugé, le Royaume chérifien a entrepris, il y a de nombreuses années, de tisser des relations de coopération économiques et socioculturelles mutuellement avantageuses avec la plupart des pays au sud du Sahara.
Cette exception ne doit pas, cependant, cacher le manque de solidarité des pays arabes à l’égard du Mali, au moment où celui-ci a le plus besoin de cette solidarité. Ne dit-on pas que c’est dans l’adversité qu’on reconnaît ses vrais amis ?
Précédant le Président de la Transition, le Président du Haut Conseil Islamique (HCI) l’Imam Mahmoud Dicko, avait également déploré cette absence de solidarité et de compassion envers le Mali, pays musulman à 95%, où la pratique du vrai islam est une réalité tangible et où les musulmans sont profonds et sincères dans leur foi.
Le Mali est un pays qui, au nom de la défense des droits de la Palestine à l’existence en tant qu’Etat souverain, a rompu ses relations diplomatiques avec Israël après la Guerre des six jours. Depuis, cette cause est devenue un élément sacro-saint de la diplomatie malienne, en dépit de l’évolution des données géopolitiques à l’échelle mondiale. Et au détriment de ses propres intérêts.
Pendant ce temps, des pays musulmans comme le Sénégal ont vite fait de rétablir leurs relations diplomatiques avec l’Etat hébreux. Ce qui n’a pas empêché le pays de Léopold Sedar Senghor d’abriter des fora de la Ummah Islamique, à l’image du Sommet de l’Organisation de la Conférence Islamique (OCI), en engrangeant les substantielles retombées liées à l’organisation d’un tel événement. Faut-il encore rappeler que l’Egypte, la plus grande nation arabe, entretient des relations diplomatiques avec Israël depuis des lustres. Cela depuis les Accords de Camp David, signés le 17 septembre 1978 par le Président égyptien Anouar el Sadate et le Premier ministre israélien Menahem Begin, sous la médiation du président des Etats-Unis Jimmy Carter ? Depuis, ces relations continuent de courir.
Pourquoi alors le Mali serait-il plus royaliste que le roi ?
En vérité, au nom de la realpolitik, les décideurs maliens seraient bien inspirés d’assouplir quelque peu les principes qui sous-tendent et ajustent sa carte diplomatique à la lumière des derniers développements de la crise que notre pays traverse. Et donc rétablir nos relations diplomatiques avec Israël, à l’instar d’autres pays africains.
Cela ne devrait pas empêcher notre pays de plaider, comme il l’a toujours fait, en faveur de l’avènement d’un Etat palestinien, jouissant de tous ses droits de souveraineté et reconnu par l’ONU, car cette cause noble est tout simplement une question de justice. Sans tomber dans la naïveté, avec de la bonne volonté de part et d’autre, cet Etat peut bien coexister et vivre en bonne intelligence avec l’Etat d’Israël. Une nouvelle situation qui permettrait aux autorités maliennes d’exercer une discrète pression sur le gouvernement de Tel Aviv.
En retour, le Mali pourra bénéficier, entre autres domaines de coopération, de l’expertise d’Israël dans les domaines de l’agriculture et de la sécurité. Car Israël est l’un des leaders mondiaux dans les technologies de l’agriculture: de l’agriculture high tech aux serres chaudes à l’irrigation, en passant par l’industrie laitière, l’aquaculture et les énergies alternatives. Avec ses immenses potentialités agricoles, le Mali pourrait en profiter pour opérer sa révolution verte et nourrir ainsi toute l’Afrique de l’Ouest.
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La rédaction