L’histoire répond souvent aux besoins des sociétés de régler leurs comptes aux équivoques. C’est ce que sont en train de subir les Frères chez les Arabes et assimilés. Il faut dire que l’exemple du grand frère turc, Rajeb Tayeb Erdogan, ne signifiait pas grand-chose. Mais quand Mohamed Morsi, le président égyptien, s’y met, ce ne sont plus des doutes qui assaillent l’opinion. On pouvait deviner que les accointances avec les Etats-Unis n’étaient pas gratuites, que la reconduction des relations israélo-égyptiennes ne relevait pas du simple respect des accords internationaux, sauf que les certitudes se mettent en place. Les Frères sont bien inscrits dans le camp qu’ils ont aidé à déstabiliser ou à détruire les nationalismes de la région. Même si, dans le discours officiel, ils sont autorisés à y aller de leurs diatribes, même s’ils croulent sous les lauriers pour avoir « réussi » à parvenir à un cessez-le-feu à Ghaza, les Frères égyptiens ont avant tout accepté de garantir à l’entité sioniste de ne plus subir la riposte, car c’est de riposte qu’il s’agit, contre son blocus. Apparaît cette lettre de Morsi, écrite le 19 juillet dernier, à Shimon Peres, où il lui donne du « mon cher et grand ami », « votre ami fidèle », lui fait part de son « grand désir de développer les relations amicales », des propos qui dépassent largement le simple effet protocolaire. Hosni Moubarak aurait été plus sobre. Le pire est que la lettre a d’abord été cachée et niée, prouvant l’intention coupable d’une personne issue d’un mouvement dont la principale insulte contre les adversaires politiques est leur assimilation aux Juifs. Les Frères marocains, plus loin des regards, n’en font pas moins dans ce type de relations, en droite ligne de la conduite de Mohammed VI qui, selon un article de JSS News, « est à l’image de son père, un bon roi. Mais il sera demain un grand roi quand il rentrera dans les livres d’histoire pour son apport à la paix au Proche-Orient » et, selon le souhait de Barack Obama, « va jouer un rôle important dans le rapprochement entre le Monde arabe et Israël ». Le député druze israélien, Majali Wahabi, vice-président de l’Assemblée parlementaire pour la Méditerranée (APM), qui a répondu au message : « La famille royale vous invite à titre personnel au colloque (les défis énergétiques dans l’espace euro-méditerranéen) comme prévu (Ouarzazate du 14 au 16 septembre) », a tenu des entretiens officiels avec des membres du Parlement marocain et des ministres du « nouveau gouvernement marocain ». En Tunisie, c’est une clause antisioniste qui met les Frères dans l’embarras. Ils sont contre le fait, avec acharnement, que cette clause, qui criminalise « toute forme de normalisation avec l’entité coloniale sioniste », soit inscrite dans la Constitution. Encore, peut-être, loin de s’accuser de vouloir nouer des relations avec le sionisme, ils n’en trahissent pas moins un sens caché dans cette attitude, qui ne peut avoir comme explication que la réponse aux exigences des alliances qu’ils ont contractées avec, au moins, les néoconservateurs étatsuniens et à celles de ne rien gâcher de la sympathie occidentale en général. Et plus loin, se maintenir dans la ligne de leur confrérie.
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